Science et conscience
Par Philippe Petit - France Culture
Heidegger, le mal et la science
11.06.2009
L'engagement convaincu de Martin Heidegger dans le nazisme est impardonnable. Son oeuvre en demeurera entachée à jamais. Dans un cours donné en 1934, La Logique comme question en quête de la pleine essence du langage, le philosophe se met en scène et se pose à lui-même cette question : « Le recteur peut bien apparaître en uniforme de la S.A. au lieu de la robe officielle de vieille tradition » ? Martin Heidegger réussit un exploit unique dans la philosophie. Il fait d'une réflexion sur la logique une réflexion politique. La logique est le bout d'une chaîne qui conduit à l'Etat, défini comme « l'être historial du peuple ». Puisque la question de la logique est, selon lui, celle du langage, elle est aussi celle de l'homme, du peuple, de l'histoire et de l'Etat. Ainsi, de saut en saut, le lecteur est-il conduit du terrain de la logique au nazisme. La pensée développée dans ce cours ne résume pas à elle seule l'oeuvre de Martin Heigegger. Elle est toutefois une indication de lecture. La critique du libéralisme des Lumières, de l'atomisme social, de la science objectiviste, du sujet moderne, de l'intellectualisme, s'inscrivent dans l'horizon du nazisme sans s'y réduire. « L'ébranlement de la logique » dont parle Heidegger dans ce cours 1934 est-il vraiment un ébranlement ? On ne peut répondre correctement à cette question sans en élargir le propos. « Une bonne compréhension du message de Heidegger passe par la vision de la diversité des usages systématiques de sa pensée qui ont été d'ores et déjà engagés » écrivait le philosophe JM Salanskis en 1997. Parmi eux, l'usage technophobe, voir antiscientifique est le plus courant. Heidegger serait aux yeux des contempteurs de la modernité une sorte de conscience de l'écologie et de la vie bonne. Il faut selon JM Salanskis franchir un pas au-delà. Comment faut-il user de Heidegger ? Existe-t-il un rapport entre la faillite politique de Heidegger et sa distance envers la science ? Ces questions sont au centre de son dernier livre Heidegger, le mal, la science.
Invités :
Jean-Michel Salanskis, professeur de philosophie à l'université de Paris X-Nanterre.
François Sebbah, enseignant à l'université de technologie de Compiègne et directeur de programme au collège international de philosophie.
Marc Crépon, philosophe, directeur de recherche au CNRS.
Par Philippe Petit - France Culture
Heidegger, le mal et la science
11.06.2009
L'engagement convaincu de Martin Heidegger dans le nazisme est impardonnable. Son oeuvre en demeurera entachée à jamais. Dans un cours donné en 1934, La Logique comme question en quête de la pleine essence du langage, le philosophe se met en scène et se pose à lui-même cette question : « Le recteur peut bien apparaître en uniforme de la S.A. au lieu de la robe officielle de vieille tradition » ? Martin Heidegger réussit un exploit unique dans la philosophie. Il fait d'une réflexion sur la logique une réflexion politique. La logique est le bout d'une chaîne qui conduit à l'Etat, défini comme « l'être historial du peuple ». Puisque la question de la logique est, selon lui, celle du langage, elle est aussi celle de l'homme, du peuple, de l'histoire et de l'Etat. Ainsi, de saut en saut, le lecteur est-il conduit du terrain de la logique au nazisme. La pensée développée dans ce cours ne résume pas à elle seule l'oeuvre de Martin Heigegger. Elle est toutefois une indication de lecture. La critique du libéralisme des Lumières, de l'atomisme social, de la science objectiviste, du sujet moderne, de l'intellectualisme, s'inscrivent dans l'horizon du nazisme sans s'y réduire. « L'ébranlement de la logique » dont parle Heidegger dans ce cours 1934 est-il vraiment un ébranlement ? On ne peut répondre correctement à cette question sans en élargir le propos. « Une bonne compréhension du message de Heidegger passe par la vision de la diversité des usages systématiques de sa pensée qui ont été d'ores et déjà engagés » écrivait le philosophe JM Salanskis en 1997. Parmi eux, l'usage technophobe, voir antiscientifique est le plus courant. Heidegger serait aux yeux des contempteurs de la modernité une sorte de conscience de l'écologie et de la vie bonne. Il faut selon JM Salanskis franchir un pas au-delà. Comment faut-il user de Heidegger ? Existe-t-il un rapport entre la faillite politique de Heidegger et sa distance envers la science ? Ces questions sont au centre de son dernier livre Heidegger, le mal, la science.
Invités :
Jean-Michel Salanskis, professeur de philosophie à l'université de Paris X-Nanterre.
François Sebbah, enseignant à l'université de technologie de Compiègne et directeur de programme au collège international de philosophie.
Marc Crépon, philosophe, directeur de recherche au CNRS.